Au travail, les chrétiens s’interrogent sur l’IA
Energivore, injuste en matière de droits d’auteurs, menaçante pour les emplois: l’intelligence artificielle (IA) pose de sacrés défis aux cadres chrétiens. Cet outil procure «une impression de perte: celle de notre autonomie intellectuelle, de nos emplois, de la maîtrise de nos données…» a rappelé en ouverture Thomas Joachim, vicaire de la paroisse Saint-François-de-Sales, à Genève, qui a aussi souligné les risques écologiques et le «technostress» que provoque ce nouvel outil. «Nous nous posons tous la question: ‹Jusqu’à quand vais-je réussir à m’adapter?›»
Pour retrouver une «docte espérance», Thomas Joachim propose trois boussoles: se demander quel désir, individuel ou collectif, on projette sur l’IA, interroger la confiance portée dans l’outil et clarifier les combats à mener pour que cette technologie «aille dans le sens du bien et non du pire». L’omniprésence des algorithmes dans nos vies reste, cependant, une chance pour revaloriser «une pensée méditante, affective, le sens de la poésie et du cœur», souligne Thomas Joachim.
Le philosophe Fabrice Hadjadj voit même dans l’avènement de cette technologie un «moment providentiel pour ressaisir ce que nous sommes», en tant qu’humains. Selon lui, l’IA montre qu’il existe des institutions «vermoulues, impersonnelles», maintenues au fil des ans, mais parfois vides «de sens, de sagesse». Par exemple? «L’école où les élèves font leurs devoirs avec ChatGPT!» Le moment semble venu de repenser les «communautés d’enseignement».
Relations de pouvoir
La généralisation de l’IA va entraîner de nouveaux équilibres sociaux qu’il importe d’aborder avec des questions éthiques et anthropologiques fondamentales, comme les a formulées Paolo Benanti, frère franciscain et professeur d’éthique des technologies: à qui appartient la valeur produite par les algorithmes? Quelles nouvelles relations de pouvoir naissent de ces équilibres? De l’humain ou de la machine, qui contrôle qui? Quelles capacités humaines et donc quel savoir choisissons-nous exactement de transférer aux algorithmes? Quel impact de ces choix pour notre liberté individuelle?
Des aiguillons utiles pour les chefs d’entreprise et développeurs présents, qui utilisent l’IA au quotidien. Ceux qui les implantent dans leurs entreprises ont partagé une conviction: le refus de toute «idolâtrie», qui guette toujours face à la technologie.
Conseils pour implanter l’IA en entreprise
• Eviter «l’IA pour l’IA»: identifier clairement où l’IA apporte une valeur ajoutée, développer l’IA pour répondre à des objectifs précis.
• Former, informer tout le monde, ne laisser personne de côté.
• Essayer de développer ses propres solutions internes, ses outils maison spécialisés basés sur des IA européennes souveraines.
• Veiller à l’intégrité des données (consentement, lieu de stockage, protection, réutilisation…).
• Garder en interne la maîtrise et la compréhension de l’outil.
• Démarrer «petit», sur des tâches ingrates et répétitives à automatiser.